21 mars 2010

OBJECTIF 2 HEURES




La fin de la troisième semaine d'entraînement pointe le bout de son nez.
D'après le plan je dois faire 1 h 20 en endurance samedi et 2 heures de sortie longue avec des allures marathon.

Je bouscule un peu tout ça car je me suis inscrite au semi de la Brière pour fêter le printemps et le soleil nouveau.

Du coup samedi au lieu de faire le plan, je fais 5 kms tranquille accompagnée de mon mari bien-aimé.
ça fait un baille que nous n'avons pas couru ensemble et c'est toujours aussi plaisant de papoter tous les deux en partageant ce moment particulier.

Bon, c'est bien beau, mais j'ai l'impression de n'avoir rien fait. une petite demi-heure de course à pied, cela n'est plus assez pour me satisfaire.
Dire qu'il y a un an je faisais 3 kms et j'étais toute fière d'annoncer que j'étais crevée parce que j'avais couru.

La journée passe très très vite, et bien sûr je m'astreins à ingurgiter pas mal de féculents en prévision de demain.
D'abord sushi et riz japonais le midi et pâtes italiennes le soir.

Dimanche matin, je suis un peu fébrile. C'est incroyable la pression que je me mets dès lors que je suis inscrite à une course.
L'objectif officiel : 2 heures sur ce semi.
Mon objectif officieux : 1 h 58...

Je checke tout ce que je dois emmener :
ravitos - checkey
ipod - checkey
change - checkey
immodium lingual - checkey

7 h 45 : nous embarquons tout le fourbi dans ma polo et en route pour St André des Eaux.

Il fait grand beau, le soleil est de la partie, je suis anxieuse et j'ai la trouille.
Une multitude de questions m'assaillent...
Vais-je tenir l'allure ? vais-je avoir mal au ventre ? et si ça m'arrive comment je vais faire ?
Y aura t'il assez de monde pour que je ne sois pas toute seule à la queue ?
Et s'ils n'ont pas bien enregistré mon inscription ?
vais-je réussir à retirer mon dossard à temps ?
Pourvu que je ne me blesse pas ! pourvu que j'y arrive ! pourvu que, pourvu que ...

Me voilà enfin avec le dossard en main. J'ai mis la puce sur ma chaussure en vérifiant 50 fois qu'elle tenait bien.
Nous repartons nous asseoir dans la voiture car il n'est que 9 h 15 et le départ est dans une heure.
Mince j'ai encore faim, le stress ça me pompe toute mon énergie.
Et puis j'ai soif, mais si je bois maintenant, je vais pas arrêter de pisser tout le long du parcours.

J'attends 9 h 20 et je pars faire quelques foulées d'échauffement. Je suis un diesel, il me faut faire travailler la machine pour pouvoir partir assez vite toute à l'heure.
Oui, mais voilà, il faut aussi que je fasse attention à ne pas trop dépenser d'énergie.
je cours à menues-foulées et mon coeur monte très vite. De toute façon même sans rien faire, mes pulses sont assez élevées ce matin, je tourne pas loin de 70 bpm alors que d'habitude je suis autour de 50.

Voilà 15 min que je trottine et je préfère cesser avant d'épuiser mes réserves.
je pars aux toilettes pour un dernier pipi et là c'est le drame olfactif.
Une odeur nauséabonde a envahi l'espace et j'apprends qu'une chasse d'eau ne fonctionne plus.
C'est la queue jusque derrière la porte d'entrée.
ça sent l'urine, la merde et la sueur.
Il faut que je prévienne Magali... Non les filles ne sont pas des princesses qui ont des fleurs dans le ventre et ne font jamais caca. Et si elle veut des preuves je la traîne le matin d'une course dans les toilettes publiques et elle me croira.

Du coup ça me coupe la faim (c'est plutôt pas mal) et je repars rapidement à l'air frais car je suis restée en apnée pendant que je me "repoudrais le nez".

Tugdual n'arrête pas de me demander : "tu es prête ?"
et je n'arrête pas de lui répéter : "je ne sais pas"
et lui me répond : "mais si tu es prête !"

Comme à chaque fois, je suis peu sûre de moi et n'ai plus du tout confiance en mes capacités.

Nous regardons le départ du 7 kms et Tugdual est déçu de ne pas courir au moins celle-là.
Mais il est crevé par trop de nuits blanches et il doit prendre l'avion ce soir pour l'Argentine.
Je préfère qu'il reste sur le bas-côté.

Le départ prévu à 10 h 15 est annoncé à 10 h 30. Je n'aime pas trop les retards de ce genre car je me refroidie très vite et ce n'est jamais très bon.

Nous marchons quelques mètres, puis trottinons ensemble sur 200 mètres.
Il est 10 h 15 et tout à coup j'entends que le départ va être donné.
??? Je suis surprise et m'avance vers le sas de départ en donnant mon pull à Tugdual.
Nous partirons en fait à 10 h 20 et pas mal de personnes louperont de plusieurs minutes le départ.
C'est préjudiciable, car ce parcours sert de qualification pour les championnats de France.
Je pense que certains vont pas mal se plaindre à l'association.

Les premières foulées n'en sont pas vraiment. Nous sommes agglutinés les uns aux autres et je n'arrive pas à prendre mes marques.

Au bout d'un demi kilomètre j'arrive enfin à m'extirper de la masse et commence à allonger mes pas. Il faut que je tienne 5:40 du km.

J'espère trouver une personne qui a le même objectif pour faire la course à ses côtés.

Mais très vite je m'aperçois que prise dans l'euphorie je suis bien au-dessus de mon objectif.
je regarde ma montre mais mon coeur tient bon, je suis à 160 bpm.
Je décide de continuer ainsi, je me sens bien.

Je ne regarde pas vraiment le paysage, ni les gens qui m'entoure, je me suis enfermée dans ma bulle. je suis concentrée, la casquette enfoncée jusqu'aux yeux. J'analyse ma foulée, je gère ma posture. Je me veux le plus efficace possible.

Je double pas mal de petits groupes, c'est à ce moment que je m'aperçois que j'ai vraiment progressé. Ces petites groupes, il y a quelques mois, j'aurais mis beaucoup plus de temps à les dépasser.

Voilà maintenant 8-9 kms que nous courons, c'est chouette car je ne suis jamais seule.
Je sens des gargouillis familier dans mon ventre, vite je fais fondre mon immodium sous la langue. En temps normal j'aurais tenté le diable, mais là, il ne faut pas que quelque chose vienne gâcher cet évènement.

Je suis toujours extrêmement surprise de m'apercevoir qu'à ce moment de la course des personnes décident d'accélérer.

Je me fais dépasser par 2 groupes de 2 filles, cela me surprend d'autant qu'elles n'ont pas l'air très en forme.

Je laisse faire et ne m'affole pas. je me dis en moi-même "je les gratterais au 15ème".

Je reste derrière, je suis hyper concentrée. J'ai l'impression d'être efficace dans ma façon de courir, d'avoir éliminer tous les mouvements parasites.
je me sens droite, mes jambes et mes bras moulinent de concert. Sans mentir, je peux même ressentir les fluides de ma moelle épinière. C'est comme si quelqu'un tirait sur ma colonne et m'alignait parfaitement.
Je ne cours plus, je roule, je suis sur des rails, y a plus qu'à...

12ème kilomètres, je me force à manger tous mes Jelly Bean Sport- je sais que l'effet se fera ressentir maintenant pour le reste de la course et que même si je ne sens rien maintenant, cette énergie sous forme de bonbons va m'être de la plus grande utilité.

Pour l'instant j'ai accéléré constamment et tranquillement tout du long.

14ème kilomètre, je décide de mettre un peu plus la gomme, j'en ai encore sous la pédale et comme je commence à bien me connaître, je sais que je peux encore gérer un plus gros effort pendant plusieurs minutes.

C'est parti je double pas mal de paquets, au 15ème je redouble les copines du 8ème kilomètres.
Il y a en une qui a déjà coincé au 10ème avec un point de côté. Les autres ne sont plus très fraîches.
Moi je me sens en super forme.

16ème-17ème kilomètre : c'est comme si un coup de massue s'était abatu autour de moi, je vois mes compagnons de route sonnés et ralentir.
ça m'impressionne toujours de constater que tout semble aller bien pour tout le monde et que 4 kilomètres avant la fin, beaucoup s'effondre.
ça me file le moral, car moi je sens que j'en ai encore sous le pied, je n'ai pas encore donné la pleine mesure.

17ème-18ème kilomètres : plus aucune hésitation, c'est dur maintenant psychologiquement car c'est presque la fin mais il reste encore 3-4 kms.
Tant pis si je dois me cramer, c'est maintenant.
Alors là j'en mets un bon vieux coup. J'y vais franco et peu importe les faux plats, les changements de revêtement ou les grands gaillards qui ont l'air plus en forme.
J'y vais tous shuss.

Je double tout ce que je peux doubler, les grands, les petits, les maigres, les gros, les baraqués, les jeunes, les vieux, ceux qui sont en club, ceux qui sont tout seuls, les poilus, les chauves, les trapus, les bien-roulés, les filles, les femmes, les hommes, les mecs....Tout ce que je peux, je vous dis.

J'en vois un qui marche, puis qui sprint, puis qui remarche. Je finis par l'avoir lui aussi.

Un compagnon de hargne m'a rejointe, il a l'air de très bien gérer sa course et paraît très en forme. Autour de nous c'est Waterloo, pas mal marchent, arrêtent, n'en peuvent plus.

Je suis ce compagnon, l'homme au tee-shirt rouge et la bouteille à la main.
Il est fort, bien au-dessus de mon niveau. Tant mieux, il m'oblige à me surpasser.

Une des nanas qui m'avait doublé au 8ème et que j'ai redoublé Au 14ème, me redouble à nouveau. Je l'avais repérée, je savais qu'elle n'était pas cuite.
Moi je ne sais plus très bien si je suis cuite, crue, mourante ou encore vivante.

20ème km, je gratte l'homme en rouge et la petite nana.
Je suis au bord de la crise cardiaque.

20,9 kms : les derniers 200 mètres, je décide de finir, de me finir, de m'achever sur un sprint.
l'homme en rouge fait de même, mais il est bien plus frais que moi, il m'enrhume à 50 mètres de la ligne d'arrivée. Je souris, et je ne sais pas pourquoi, mais ça me fait plaisir qu'il passe devant moi.

Je pose mon pied sur la ligne et ma montre affiche 1 h 57.

J'ai tout donné, je reste à divaguer un peu dans le sas avant de rendre ma puce.
Comme un boxeur sonné après un KO, mes repères mettent du temps à revenir.

ça y est c'est fini. C'est passé si vite.
Je n'ai rien vu du paysage, je n'ai vu que mon ombre petite car le soleil était haut et le bitume que j'ai avalé.
Je pourrais détaillé chaque grain de cette route mais impossible de vous décrire les paysages que j'ai traversés.
J'ai le vague souvenir d'un sous-bois, de quelques faux-plats et d'un petit garçon qui nous attendait le tuyau d'arrosage à la main pour nous asperger de son eau régénérante et vivifiante.

Je suis contente d'avoir amélioré mon record de 11 min mais surtout d'être passée sous la barre des 2 heures, même si ce n'est que de quelques minutes.

Ce semi m'a redonné confiance en moi pour le marathon.
Maintenant il ne me semble plus impossible de le courir à 10 kms/h.

Résultat :
5min33 du km en moyenne (10,8 kms/h)
4min03 du km en pointe (14,8 kms/h)
1 400 kcal sur cette course.
165 bpm en moyenne.
Aucune douleur aux jambes, aucune courbatures, aucune crampes.
Pas d'ampoules, aucun ongle noir.
Même pas de sensation de jambes dures (alors qu'au premier semi, oulala oui)

Des photos
*************************************************

Wooowoooo, je viens de voir les résultats :
Temps couru : 1 h57
Temps officiel : 1 h 58 : 02
et attention
35ème de ma catégorie (Sénior Femme) sur 75

Alors ça !!! qui l'eut cru (pas moi, j'ai relu 3 fois de suite)

Aucun commentaire: